Prenons cela comme un droit de réponse...
Ces quelques lignes extraites d'un ouvrage de STENDHAL intitulé RACINE ET SHAKESPEARE (1823) relatent cette anecdote qui ne sera pas sans rappeler des réactions suscitées par la dernière mise en scène de l'option théâtre : Les Règles du savoir-vivre dans la société moderne de Jean-Luc Lagarce.
L'année dernière (août 1822), le soldat qui était en faction dans l'intérieur du théâtre de Baltimore, voyant Othello* qui, au cinquième acte de la tragédie de ce nom, allait tuer Desdemona, s'écria « Il ne sera jamais dit qu'en ma présence un maudit nègre aura tué une femme blanche. » Au même moment le soldat tire son coup de fusil, et casse un bras à l'acteur qui faisait Othello. Il ne se passe pas d'années sans que les journaux ne rapportent des faits semblables. Eh bien ! ce soldat avait de l'illusion, croyait vraie l'action qui se passait sur la scène. Mais un spectateur ordinaire, dans l'instant le plus vif de son plaisir, au moment où il applaudit avec transport Talma-Manlius disant à son ami : « Connais-tu cet écrit ? », par cela seul qu'il applaudit, n'a pas l'illusion complète, car il applaudit Talma, et non pas le Romain Manlius ; Manlius ne fait rien de digne d'être applaudi, son action est fort simple et tout à fait dans son intérêt.
Ces quelques lignes extraites d'un ouvrage de STENDHAL intitulé RACINE ET SHAKESPEARE (1823) relatent cette anecdote qui ne sera pas sans rappeler des réactions suscitées par la dernière mise en scène de l'option théâtre : Les Règles du savoir-vivre dans la société moderne de Jean-Luc Lagarce.
L'année dernière (août 1822), le soldat qui était en faction dans l'intérieur du théâtre de Baltimore, voyant Othello* qui, au cinquième acte de la tragédie de ce nom, allait tuer Desdemona, s'écria « Il ne sera jamais dit qu'en ma présence un maudit nègre aura tué une femme blanche. » Au même moment le soldat tire son coup de fusil, et casse un bras à l'acteur qui faisait Othello. Il ne se passe pas d'années sans que les journaux ne rapportent des faits semblables. Eh bien ! ce soldat avait de l'illusion, croyait vraie l'action qui se passait sur la scène. Mais un spectateur ordinaire, dans l'instant le plus vif de son plaisir, au moment où il applaudit avec transport Talma-Manlius disant à son ami : « Connais-tu cet écrit ? », par cela seul qu'il applaudit, n'a pas l'illusion complète, car il applaudit Talma, et non pas le Romain Manlius ; Manlius ne fait rien de digne d'être applaudi, son action est fort simple et tout à fait dans son intérêt.
A propos de cette anecdote, Dominique Bernard dans son ouvrage intitulé Le Théâtre, apporte l'éclairage suivant :
Le spectateur (...) n'éprouve jamais cette "illusion parfaite", mais une illusion imparfaite. (...) Le spectateur assiste à la représentation comme si les événements représentés se déroulaient vraiment devant lui, mais il sait bien que ce n'est là qu'une convention de jeu. "Et il arrive quelque chose sur la scène comme si c'était vrai", faire dire Claudel à Lechy, le personnage de l'actrice dans L'Echange.
Ce à quoi Antoine Compagnon ajoute :
Ici, ce que le soldat de Baltimore introduit, c'est l'idée de convention littéraire. La littérature, comme tout discours suppose, des conventions, et la première de ces conventions, c'est qu'il s'agit de littérature. Le soldat de Baltimore n'était jamais entré dans un théâtre, il n'avait jamais vu une pièce de théâtre, il ne savait pas à quoi s'attendre. La littérature est une attente. Entrer en littérature, comme lecteur ou comme spectateur, mais aussi comme auteur, c'est intégrer un système d'attentes. La première, au sens de la plus fréquemment sollicitée par l'oeuvre littéraire, c'est l'attente de fiction, la willing suspension of disbelief, la suspension volontaire de l'incrédulité, ainsi que l'appelait Coleridge.
Parfois, il arrive donc que l'on oublie la convention, et c'est la naissance de bien des malentendus.
Parfois, il arrive donc qu'on prête des intentions à ceux qui travaillent sur un spectacle comme si, au sein d'une école, un éducateur pouvait prendre "en otage" ses élèves pour provoquer, voire régler des comptes, avec quiconque.
Ce sont souvent ceux qui n'aiment pas le théâtre, ou qui n'y connaissent rien (ou pas grand-chose), qui se permettent d'avoir de tels jugements !
On ne fait pas le travail que j'ai accompli ces 7 dernières années, on ne passe pas le temps que j'ai passé avec les élèves chaque année, pour tout détruire en 3 soirées. Ce serait se méprendre sur l'éducateur que je suis qui a, depuis toujours, eu une inébranlable confiance en la pertinence des élèves, à partir du moment où ils étaient accompagnés dans leur démarche et dans leurs choix.
Rien dans cette mise en scène des Règles du savoir-vivre dans la société moderne de Jean-Luc Lagarce qui n'ait été le fruit d'une discussion avec chacun des élèves, pour que chacun, justement, ne se sente pas pris "en otage" par des choix qu'il n'accepterait pas. En somme, de la pédagogie, rien de plus !
Olivier Massis
On voit que parfois les mots peuvent aller plus vite que la pensée, voire devenir totalement étonnants, comme si une morale sous-jacente nous faisait toujours voir le mal là où on veut bien le voir, quitte à s'en convaincre par toute une série d'arguments tous plus objectifs les uns que les autres.
Encore une fois, tout n'est que rapport à la convention littéraire du projet.
En voici un extrait :
"ASTERIX, TOXICO ET POURFENDEUR DE LA CULTURE ?"
Coutumier des victoires expéditives, Astérix a néanmoins subi, le 18 septembre dernier, une cuisante dérouillée. Porté via les ondes de Frane Info, le coup est venu de Michel Serres, énième humaniste à passer au crible les aventures du valeureux Gaulois, mais premier d'entre eux à lui régler son compte. Outre la violence crasse et la toxicomanie patentée des irréductibles Gaulois -- la potion magique, c'est pas du petit-lait --, le philosophe a dénoncé leur supposé mépris de la culture. Cette dernière tare s'illustrant dans le sort réservé, à la fin de chaque album, au barde Assurancetourix : privé de banquet, bâillonné et ligoté à un arbre. Quant à ceux qui craignent que le ciel ne soit tombé sur la tête de l'éminent intellectuel, qu'ils se rassurent. Il a depuis reconnu s'être emporté un peu vite..."
Certes, Monsieur Serres, vous vous êtes emporté un peu vite, mais n'en doutons pas, ce genre d'arguments n'est pas tombé que dans les oreilles de sourds !